Rashid, l’enfant de Sinjar : un film pour ne pas oublier le génocide des Yézidis

Rédigé le 26/11/2025
Cinéma | سينِما


La récente condamnation en Belgique pour le génocide des Yézidis réveille la mémoire d’une tragédie souvent reléguée dans les marges de l’histoire contemporaine. Au croisement de la justice et du cinéma documentaire, le film « Rashid, l’enfant de Sinjar » s’inscrit dans cette volonté de faire entendre des voix trop longtemps étouffées. Présenté prochainement au Festival du film méditerranéen de Bruxelles, il retrace la trajectoire bouleversante de Rashid, un adolescent irakien rescapé de Sinjar, marqué à jamais par la barbarie de Daech.  

Né d’une rencontre fortuite sur les terres meurtries du nord de l’Irak, le projet est avant tout une histoire de regard et de reconnaissance. Alors qu’elle travaillait sur un autre reportage, la réalisatrice découvre Rashid, à peine âgé de treize ans, mutique, hanté par les souvenirs de la captivité et de la fuite. Son silence, bientôt brisé par une lettre d’une sincérité déchirante, devient le fil conducteur du film. Il incarne à la fois la douleur d’un peuple et la résilience d’une génération qui cherche à se reconstruire parmi les ruines.  

Le documentaire suit Rashid dans son quotidien, dans ses silences, ses hésitations et ses rares éclats de joie. À travers son regard, la caméra explore les séquelles invisibles du génocide : le poids du souvenir, la perte de l’enfance, mais aussi la persistance d’une force intérieure. Car chez Rashid, malgré tout, persiste une volonté farouche de vivre, d’apprendre et de retrouver sa culture. Sa grand-mère, gardienne des traditions yézidies, l’accompagne dans ce retour à soi en lui transmettant la mémoire d’un peuple que Daech avait voulu anéantir au nom d’une haine religieuse.  

Certaines scènes frappent par leur intensité, notamment celle d’une cérémonie commémorative où Rashid et sa mère font face à la douleur encore brûlante du passé. Un chant monte dans l’air, évoquant Sinjar comme une plaie ouverte, rappelant ce que le monde a préféré oublier. À travers cette séquence, le film rappelle que l’acte de mémoire n’est pas seulement un devoir moral, mais une étape nécessaire à la guérison collective.  

Aujourd’hui, Rashid a 19 ans. Il tente de bâtir un avenir loin des décombres de son enfance. Son sourire, mêlé d’espoir et de pudeur, vient clore un récit marqué par la désolation, mais jamais par la résignation. Dans un contexte où les procès pour génocide se multiplient enfin en Europe, « Rashid, l’enfant de Sinjar » fait œuvre de mémoire et d’humanité. Il confirme le pouvoir du cinéma à rendre visibles les blessures de l’Histoire et à rappeler que, derrière les chiffres et les verdicts, demeurent des vies à reconstruire.